En france, je me sens mal. Depuis toujours. Pourtant, j'aime beaucoup le patrimoine de ce pays, sa gastronomie, ses musées, ses châteaux, sa haute couture. Mais au quotidien je ne me sens pas à ma place. Je me suis toujours demandé d'où ça venait : de mon physique ? de mon franc-parler ? de mes ambitions ? Déjà à l'école, je n'inspirais pas de respect aux élèves dont certains me harcelaient. Pourtant j'étais sérieux, j'avais de bonnes notes, j'étais obéissant, ne faisais pas d'embrouilles. Plus tard, mon chemin de vie a été jalonné de mépris en tous genres, de violences, de haines. Combien de fois me suis-je répété : "qu'est-ce qui cloche chez moi ?" A force d'être rejeté sans raison, on culpabilise énormément, on se déteste, on fuit les autres et on se fuit soi-même.
Quand j'habitais au québec, je n'avais pas de problèmes particuliers pour mes lier aux autres, ça se faisait naturellement. Et quand je suis revenu vivre sur paris ... ce fut de nouveau la dégringolade. Pas de liens, rien, pas de nouvelles amitiés solides, pas de contacts sympas avec les voisins. Rien. J'ai trouvé un peu de consolation dans le bénévolat, car au moins on respecte un peu les services que je rends. Du fait de mes origines italiennes, je suis une personne tactile. J'ai toujours besoin, envie de toucher, de caresser, d'embrasser, de regarder dans les yeux, de sourire, de prendre les mains. J'ai terriblement besoin de ce contact câlin avec les autres. A cause de cette attitude, en france on me prend pour une pute. En italie, les gens sont plus excentriques, plus sensuels aussi, on se touche pour mieux se parler, se comprendre. En fait, j'ai réalisé que les français se savent plus dialoguer, être deux ; ils restent enfermés dans leurs carcans, il n'y a pas de débats d'idées. C'est la tyrannie de la pensée unique.
Je viens d'écouter gaspard koenig à la radio ; cet ancien agrégé de philosophie se présente comme candidat à la présidentielle. Ce que j'ai aimé, c'est que ça ne puait pas le programme politique surfait et imbécile : au contraire, ce mec parle franc, il réfléchit. Il dénonce le fait que la politique française se réduit aujourd'hui à la personnalité des candidats affichés sur les réseaux sociaux, niant tout débat d'idées. Il a donné l'exemple des suisses qui, pendant toute une journée, vont à l'agora pour écouter les candidats en le regardant en face ; pas d'écran, pas d'applis stupides mais du vrai, de la démocratie directe.
Je trouve que mon ressenti de mal-être en france trouve son origine dans l'absence de débats d'idée en politique. Nous ne sommes plus citoyens mais sujets ; nous ne cherchons plus le contact authentique avec autrui, mais restons les esclaves de l'Image. Et nous condamnons les autres selon ce critère superficiel à l'extrême, ravageant les personnalités pour mieux asseoir la dictature de la fast-pensée.